bienveillantes (Les) de Jonathan Littell

	Gallimard 2006, 903 p. ISBN : 207078097X	Jonathan Littell Lien(s) vers le Guide: - Jonathan Littell - bienveillantes (Les)
À noter : Prix Goncourt 2006 Lectures de «  Octobre-novembre-décembre 2006 » : - bienveillantes (Les) - À l'ouest rien de nouveau - Disparaître - troisième secret (Le) - femme aux melons (La) - Confessions d'une accro du shopping - Stardust - meilleur des mondes (Le) - chemin des âmes (Le) - De sang-froid - Récit véridique d'un meutre multiple et de ses conséquences - Lady S, tome 1 - Na Zdorovié, Shaniouchka !

Maximilien Aue, reconverti en industriel de la dentelle apres-guerre, revient sur son passe d'ancien officier nazi de 1941 a 1944. Loin de se deresponsabiliser, il raconte tout son parcours avec froideur, mais devoile aussi une personnalite plus qu'obscure, amoureux frustre de son soeur jumelle, il peine a s'affirmer sexuellement.
Apres avoir mis 1 mois pour achever ce roman, j'ai un qualificatif immediat « Innoubliable », pour le temps passe a le lire certes, mais egalement pour la masse d'information historique sur la seconde guerre mondiale; le systeme nazi, l'extermination des juifs, des tsiganes..., le front russe, l'industrie de guerre, le declin de Berlin....
Le narrateur livre dans style froid et analytique toutes les horreurs qui l'entourent. Il nous montre une machine administrative effarante, une logistique sophistiquee que l'on voit a l'ouvre, de l'interieur, avec une precision siderante a travers ses faits et ses gestes . Un individu qui n'a a priori, dans ses activites professionnelles, rien d'un pervers, ni d'un ideologue fanatique. C'est un homme hante par une histoire personnelle douloureuse, par des reves et des symptomes physiques qui peuvent faire croire a une degradation morale intense, mais aussi un fonctionnaire du crime sans passion ni compassion, sans doutes ni hesitations, mu par un pur et simple et effrayant souci d'efficacite. Il n'a pas ete lui meme un bourreau, mais il a participe au systeme des boureaux et en a tellement cotoye...
Seul petite deception, les longs delires sexuels du narrateur Max, surtout vers les 100 dernieres pages, delires auxquels je cherche encore un interet pour ce roman...(?)
De plus, n'etant pas germanophile, j'ai trouve penible le fait de ne pas avoir traduit directement, mais seulement dans le glossaire, les grades allemands et surtout de laisser sans traduction de nombreux mots ou expressions.
Allez courage plongez vous dedans.

Je suis prête à parier que voici un livre qui pour beaucoup sera maudit, de ces livres qu'ils commenceront plusieurs fois sans jamais l'achever: pas seulement en raison de sa longueur mais plutôt de sa densité visuelle et intellectuelle.
Je suis certaine que de nombreux lecteurs (j'en connais déjà :) ) seront réfractaires au style, aux nombreuses références à la langue allemande à laquelle pour le coup je suis familière et que j'aime. Pour en finir avec le style : il est époustouflant de culture, de précision et de souffle. Peu d'auteurs m'ont impressionné à ce point dans l'usage de notre langue, le choix de chaque mot.
Sur le fonds je ne sais pas trop par où commencer tant il y a dire, échanger, discuter sur ce livre. Comme je le lisais quelque part ce livre est déjà un classique, il suffit de lire la première page pour en être convaincu et moi aussi il y a des classiques qui me gonflent. Mais pas celui-ci !
Tout au long de cette lecture j'ai bien entendu pensé au livre de Merle La mort est mon métier qui m'avait enfin permis de sortir de mon regard manichéen sur le national-socialisme et ses atrocités, en résumé eux = monstres et moi = normal.
A travers les dialogues de Hess c'était toute la notion d'obéissance qui était perceptible et rendait ses actes explicables mais jamais excusables. Avec les Bienveillantes on va plus loin car on dépasse l'étude du cas particulier. De plus Max Aue ( personnage principal et narrateur) est certes un SS, officier, au départ il n'est pas un ponte du parti. Certes il va monter en grade mais disons qu'il est un « anonyme » de la société allemande engagée dans la SS à une époque donnée. Il n'est pas un Himmler ou Eichman mais il n'est pas non plus un simple soldat. Cela donne un intérêt supplémentaire au livre. Par contre il est sérieusement dérangé! Dérangé dans le style "Les damnés " de Visconti et c'est presue regrettable car cela monte en puissance au fil du livre et enlève un peu de crédibilité au propos de l'auteru. Comme si seul un désordre mental profond pouvait engendrer le système nazi. Hélas non! Si il y avait un paquet de cinglés il y avait aussi nombre d'hommes qui ont basculés.
Comme le dit Christiane c'est notamment et constamment le questionnemment de la barbarie, du bien et du mal, l'interrogation sur les bourreaux. Mais comme elle le souligne aussi ça va beaucoup plus loin. Lors de ses longues missions pour « Action contre al faim » Littel a étudié et rencontré des criminels de guerre, notamment en ex-yougoslavie, cela se ressent que sa réflexion a été longue et nourrie.
Littel est aussi passionné par les organigrammes, il le dit en interview et là ça se voit. La reconstitution du processus de décison ou de la non-décision est parfaitement rendu. La dilution de la responsabilité est admirablement bien décrite au travers des strates de gouvernement, administrations, des difféentes structures parallèles et des différents services.
Je conçois que cela doit en ennuyer certains, personnellement j'ai trouvé ce point essentiel à la compréhension du propos. Mais j'ai parfois aussi laisser glisser cet aspect là du livre quand je le trouvais un peu lourd à digérer.
Parce que bien que j'ai adoré ce livre je l'ai trouvé un peu long. La perfection aurait été d'écrire ce livre avec 150 pages de moins.
J'ai franchement laissé tomber les passages oniriques. Je n'ai pas accroché à cette description de Aue, ses rêves m'ont gonflés. Egalement j'ai craqué à la moitié d'un long développement sur la linguistique des peuples du Caucase. Je le dis sans gêne c'est parfois longuet. Mais cela ne justifie pas de passer à coté de ce livre fort dans tous les sens du terme.
Il ne faut pas avoir peur de lire ce livre qui contient des descriptions tout aussi ignobles, barbares que froides de l'éxécution de millions de personnes. On sera forcément écoeurés de toutes ces références au sang, au foutre, à la boue, la lie et pourtant...
Il faut lire les Bienveillantes rien que pour la description de la bataille de Stalingrad (on est loin du décevant film de JJ Annaud).
J'en avais le souffle coupé, c'est de loin la partie du livre qui m'a le plus tenue en haleine. Quel carnage, c'est l'apocalypse coté allemand alors on n'ose imaginer coté russe mais on le devine. Stalingrad est peu étudié à l'école et pourtant le fait majeur de la seconde guerre mondial. Là « justice » est rendue.
La chute progresssive de Berlin est aussi admirablement décrite car si peu souvent contée dans la littérature, sauf à ma connaissance dans l'excellent « Automne allemand » et encore on se situe déjà après le chaos. On pourrait en dire encore très long sur ce livre étonant. Le plus étonnant sans doute pour moi est qu'on ai refusé par deux fois la naturalisation française à Littel qui a vécu et étudié presque toute son enfance en France, écrit ce livre en français etc.
Mais là c'est un autre sujet.

J'ai lu et terminé non sans peine ce roman de 900 pages tant vanté par la presse et couronné maintes fois !!
Goncourt!! meilleur livre 2006 pour le magazine Lire...
Quelle déception car si au départ l'idée était originale pour l'auteur narrateur de se mettre dans la peau d'un haut fonctionnaire du régime nazi chargé de la supervision de la gestion des camps d'extermination et de montrer ses réactions d'homme embarqué dans cette sinistre mission.
Mais l'auteur se perd dans des tas de considérations philosophiques, littéraires des détails sur l'organisation de la hierarchie militaire mais se complait aussi dans la description érotique voire pornographique de ses relations sexuelles à la limite de la nausée.
On ne comprend pas qu'un homosexuel ait pu etre un officier supérieur du régime, statut particulièrement condamné par Hitler!
L'auteur veut essayer d'expliquer que tous les nazis n'étaient pas d'horribles assassins d'enfants et de femmes mais avaient des réactions de culpabilité et souffraient d'insomnie certaines nuits.
Ce roman est très dur à lire, beaucoup trop long et le style très étiré n'est certainement pas à rapprocher de celui de Proust comme je l'ai lu de la part d'un internaute.
Je ne vois vraiment pas ici le chef d'oeuvre annoncé tambour battant par les médias.

« Les Bienveillantes » (« Les Euménides »), c'est le nom qu'Eschyle donne aux Erinyes dans la dernière de ses tragédies. Littell décalque « L'Orestie ».
Une tragédie moderne ? Oui sans conteste !
Aue-Oreste hallucine, revoit ou rêve le meurtre de sa propre mère et de son beau-père. Il est aussi Œdipe terrassant son Führer... Ces références mythologiques plaquées sur le décor du IIIe Reich ont quelque chose de troublant. De la passion incestueuse du narrateur à son homosexualité difficile à dissimuler. Officier supérieur dans les SS, il a tué sa propre humanité en collaborant à la solution finale. Les bienveillantes n’ont rien d’un roman historique avec reconstitution maniaque. La guerre, la barbarie, la monstruosité, on ne la regarde pas de l’extérieur, on est dedans, comme on est dans la tête et la logique de Maximilien Aue, officier nazi reconverti en patron d’usine de dentelle, qui nous raconte son histoire à la première personne.
Le livre s’ouvre par une claque au lecteur : Max n’a pas l’intention de se justifier ni de se déculpabiliser, pas plus que l’auteur n’a l’ambition de le juger, il veut juste raconter ce qu’il a fait, comme une envie de vomir irrépressible ou alors avec la curiosité de savoir si, après tout ça, il peut encore ressentir quelque chose. « Je suis coupable, vous ne l’êtes pas, c’est bien. Mais vous devriez quand même pouvoir vous dire que ce que j’ai fait, vous l’auriez fait aussi. » Puis, nous voilà projetés sur le front de l’Est, où Max fait partie des bataillons SS chargés d’abattre méthodiquement tous les juifs et communistes dans le sillage de l’armée allemande. Il sera aussi un des organisateurs de l’Endlösung…
Puis Max Aue décrit tout comme s'il n'était qu'un témoin distant. Il raconte le baroque funèbre de la chute de Berlin avec un ricanement grinçant et évite le grandiose et wagnérien crépuscule des dieux du Reich. Une fresque baroque dans l'Allemagne de 1941 à 1945.
Écrit par un auteur Juif, donc difficile à soupçonner de sympathie avec son personnage, il le laisse à une logique qui lui est propre.... De là il se démarque complètement du style de son père. Jonathan Littell écrit serré, sans paragraphe, sans respiration, c’est difficile à lire, souvent insoutenable : on est au coeur même de la monstruosité avec rien d’humain auquel se raccrocher. Ignoble et hypnotisant. Impossible à lire d’une traite autant qu’impossible à lâcher, parce qu’en plus d’atteindre au réalisme le plus cru, Littell ne cesse jamais d’explorer, à la façon d’une Hannah Arendt, ce que c’est que le mal.
Qu'y a-t-il dans ces pages ? De l'esthétique et du brutal, Quelque chose qui ferait penser que l'on ne lit pas un livre, que l'on EST ce livre jusqu'à la fin...
Si ces neuf cents pages serrées ne vous lassent pas du spectacle des horreurs, de la barbarie et du sang, vous finirez ce roman. Mais, curieusement, vous en sortirez indemne.

Suite à un commentaire, d'un autre participant du Club (sur notre liste de discussion), Christiane à rajouté ceci sur Les bienveillantes :

« Je n'ai pas encore compris le titre »

Ce qui me l'a mieux fait comprendre est une interview de Jonathan Littell à la radio, une petite radio sur Internet Vivre FM.
« Les Bienveillantes » (« Les Euménides »), c'est le nom qu'Eschyle donne aux Erinyes dans la dernière de ses tragédies. Littell décalque « L'Orestie », sur un ton décalé et badin, comme je ne l'avais pas tout de suite non plus saisi.
Pour rappel, dans la mythologie grecque, Eschyle représente en 458 av notre ère, une trilogie dramatique : « L'Orestie » aux Grandes Dionysies d'Athènes. Elle est composée de trois tragédies centrées sur la geste des Atrides : Agamemnon, Les Choéphores et les Euménides.
La dernière des tragédies dit qu'après une longue errance, Oreste, toujours poursuivi par les Érinyes, arrive au sanctuaire d'Apollon à Delphes où il est purifié. Il est ensuite présenté devant l'Aréopage (tribunal athénien) et jugé par Athéna. Elle lui donne raison et les Érinyes deviennent les Euménides (les bienveillantes).
Max Aue sera cet Oreste qui échappe à toute justice, la comparaison va encore plus loin dans les 900 pages du roman.
L'explication du titre n'est donc aucunement innocent ! Elle se trouve dès le départ du roman (y compris imprimé sur le quart de couverture) : à l'instar des divinités vengeresses, Max est l'une elles, ce qui donne le ton: il n'est jamais jugé et termine ses jours tranquillement.
Dans cette interview, Jonathan Littell explique que si en effet il lui a fallu du temps pour sa documentation, ses recherches etc. ce sont quatre mois qui lui ont suffit à la rédaction de son pavé. Puis après l'acceptation de Gallimard de le publier, quelques mois de plus pour réviser le texte, le mettre en rythme etc.
Au passage, j'ai bien aimé la raison que donne l'auteur pour rester si discret : « S'intéresser à un auteur et sa vie parce que l'on aime son livre, c'est comme s'intéresser à la vie d'un canard parce que l'on aime le foie gras ». (sic)
Oui Max est un anormal, un jeune intellectuel névrosé et c'est voulu : ainsi dispose-t-il d'une forte capacité à se raconter, raconter les « autres normaux » pères de famille sans histoire. N'ayant ni femme ni enfant au moment des faits, peu actif par lui-même, il se place un peu en exergue de tout et témoigne...
C'est une clé de lecture du roman, dérangeante, mais sans laquelle ce roman n'aurait plus aucune crédibilité. Il ne se justifie ni se cherche des excuses, « Frères humains »... commence-t-il, la seule façon de trouver un personnage ""neutre"" dans un monde devenu l'espace d'une vingtaine d'années encore plus dingue que lui. Il fallait un personnage sans réels principes moraux pour raconter l'irracontable !
Claude Lanzmann, l'auteur de Shoa a dit avoir beaucoup aimé ce livre, tant par la précision des faits que pour les apports nouveaux qu'il n'a pu en son temps exprimer.
Les Bienveillantes est un chef d'oeuvre, avec celles et ceux qui vont apprécier ou non, mais fera date dans l'histoire de la littérature. Maintenant il est un fait que ces textes sont durs parfois, mais expriment bien une forme de pensée dite « unique » de l'époque.

Je dois avouer que j'ai eu du mal à lire ce livre et j'ai du l'entrecouper d'autres lectures car c'est un livre dur à lire. Dur déjà par tous les mots allemands dont il est parsemé (grades d'officiers,...). Moi qui ne parle pas un mot d'allemand je dois avouer que j'ai eu du mal a déchiffrer tous ces mots à rallonge et à les faire « sonner ». Dur ensuite par le contexte historique auquel il fait référence. L'auteur utilise un langage très cru pour nous montrer la réalité des choses (du point de vue de son personnage bien sur) et il ne nous épargne aucuns détails. J'en ai cauchemardé ce qui est plutôt rare.
Dur enfin par le délire scato du héros, le docteur Aue. Je me demande encore si c'était vraiment utile à l'histoire ou si l'auteur a voulu choquer le lecteur.
J'ai quand même bien apprécié ce livre même si j'ai du mal à comprendre toute la polémique qu'il y a autour. J'ai été déçu par la fin que je juge bâclée alors que tout au long du roman Littell nous ennuie avec des détails répétitifs et sans intérêts. Il aurait pu un peu plus développer, surtout qu'au bout de 900 pages on est plus à ça prêt !

Caroline Lg, 30 décembre 2007
Je lui donne la note de :

J'ai mis un certain temps à lire ce livre. Les termes allemands militaires et autres compliquent un peu sa lecture. Bien évidemment, le sujet du livre est lié à de nombreuses controverses car au-delà du nazisme et du génocide de millions de juifs sont abordés d'autres sujets tels que l'inceste, l'homosexualité, les réactions du corps. Le narrateur et héros de ce livre est Maximilien Aue, officier de la SS. Il est homosexuel et a eu de surcroît, dans sa jeunesse, des rapports incestueux avec sa soeur jumelle. Après avoir combattu sur le front russe, il se voit attribué un poste relatif à la question juive, à savoir comment améliorer le rendement du travail des juifs dans les camps de concentration à travers leur alimentation.   je ne peux qu'applaudir le talent de l'auteur qui certes, nous livre un ouvrage dérangeant avec un parlé cru, mais représente un travail de recherche énorme. Pour ma part, je ne pense pas que Jonathan Littell ait cherché à dresser un portrait mélioratif d'un nazi mais il est normal que nous ne soyons pas tous d'accord sur ce point.

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SIRIUS, 3 février 2008
Je lui donne la note de :

Il s'agit d'un ouvrage écrit d'abord en américain, puis traduit en un français des plus approximatif. Il est bourre d'anglicismes, de solécismes, barbarismes, erreurs de syntaxe, etc... Il sent la traduction pressée par le temps.
Ceci pose, l'intérêt de l'histoire n'est pas en cause. Elle prouve seulement que l'horreur la plus atroce est maintenant parfaitement banalisée.
Cependant ce roman se serait avantageusement contenté de 600 pages, si on l'avait exonéré de développements sexo-psychologiques inutiles et gênants pour une lecture sans censures d'une intrigue riche d'émotions.
La fin du roman est d'une insuffisance curieuse et inattendue.
Le garrot est trop vite relâché, si j'ose dire !

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